Pluton-Charon
21/01/2016. La résolution angulaire de Gaia est l’un des paramètres essentiels de la complétude du catalogue final, obtenu à partir de l’ensemble des observations Gaia. Elle découle de la taille des pixels dans le plan focal : ils sont rectangulaires, de taille 10x30µm2, soit 0,06 x 0,18 seconde d’arc2 en projection sur le ciel. Dans les Repéreurs d’étoiles (Sky Mappers en anglais), les pixels sont associés (binnés) deux par deux. La résolution angulaire attendue est de 0,24 seconde d’arc le long du balayage pour 0,72 perpendiculairement au balayage. Cette résolution angulaire va conditionner l’attribution ou non de deux fenêtres d’observation différentes à deux objets très proches, composantes de systèmes doubles ou multiples, que ce soient des étoiles ou des petits corps du Système Solaire.
Gaia va ainsi pouvoir observer individuellement les composantes de tous les systèmes qui ont une séparation plus grande que 0,24 seconde d’arc le long du balayage et ceci, indépendamment de la magnitude apparente de la primaire, à condition que la secondaire soit suffisamment brillante pour être détectée. Bien sûr, au cours de la mission, un système donné sera observé de nombreuses fois (de 50 à 240 fois selon sa latitude écliptique, en moyenne 70 fois) selon des angles de balayage différents : à certains transits, un système de faible séparation pourra être résolu en deux composantes alors qu’il sera observé globalement à d’autres. Ce n’est que le traitement au sol, rassemblant toutes les données, qui permettra de résoudre systématiquement les systèmes doubles jusqu’à des séparations de l’ordre de 0,1 seconde d’arc. En dehors des étoiles, Gaia mesure aussi, de la même manière systématique, des petits corps du Système Solaire : un astéroïde toutes les 10 secondes en moyenne !
De septembre 2014 à décembre 2015, il était prévu que la planète naine Pluton traverse neuf fois l’un des champs de vue de Gaia, avec une luminosité facilement accessible à Gaia. Une recherche dans la base de données Gaia a montré que ces neuf passages ont bien été détectés par le Repéreur d’étoiles : Pluton y a été observée avec une magnitude de G = 14,5 et, dans 7 cas sur 9, Gaia a aussi observé le plus gros des satellites de Pluton, Charon, plus faible de seulement deux magnitudes, et situé à moins de 0,6 secondes d’arc de Pluton.
L’orbite apparente de Charon autour de Pluton à l’époque moyenne des observations Gaia est dessinée en tirets sur la figure ci-dessus à gauche (© ESA/Gaia/DPAC/F. Mignard (OCA, Nice). A droite, Pluton (devant) et Charon (au fond) vus par la sonde New Horizons de la NASA (© NASA/JHUAPL/SwRI). L’incertitude sur cette orbite est de l’ordre de 0.03 seconde d’arc. Les positions obtenues par le traitement initial des données Gaia (IDT = Initial Data Treatment) sont montrées par des triangles rouges. Leur précision est de l’ordre de 0.07 seconde d’arc (déjà remarquable pour les Repéreurs d’étoiles de Gaia). L’erreur attendue de la solution astrométrique finale de Gaia est plus petite que la taille des petits triangles.
La séparation réelle entre Pluton et Charon est d’environ 0,6 seconde d’arc. Ce sera la séparation maximum, en projection le long d’un balayage, que Gaia pourra observer. Au contraire, si les deux corps sont parfaitement alignés perpendiculairement à un balayage, Gaia ne mesurera qu’une seule source, à peu près centrée sur le photocentre du système. Parmi les 7 observations ci-dessus, la plus petite séparation pour laquelle Gaia a pu encore observer Charon est de 0,36 seconde d’arc. Pour les deux passages où Gaia n’a pas pu distinguer les deux composantes du système Pluton-Charon, les séparations calculées le long du balayage étaient de 0,17 et 0,23 secondes d’arc. Ces observations ont permis de montrer que le pouvoir de résolution des Repéreurs d’étoiles de Gaia se situe entre 0,23 et 0,36 secondes d’arc.
Les observations prévues pour 2016, entre le 10 mars et le 15 octobre, sont indiquées en bleu : des triangles bleus (2016 good conditions) pour les deux observations pour lesquelles la séparation Pluton-Charon sera plus grande que 0,36 seconde d’arc, des disques bleus pour les autres (2016 poor conditions). Parmi ces quatre dernières, seule celle du 4 avril 2016 pourrait permettre de mesurer distinctement Pluton et Charon, alors séparés de 0,28 seconde d’arc. Si on peut effectivement les mesurer séparément, cela permettra de dire que le pouvoir de résolution des Repéreurs d’étoiles de Gaia se situe dans un intervalle plus restreint : entre 0,23 et 0,28 secondes d’arc.
Pour plus de détail (en anglais), voir Gaia image of the Week du 21 janvier 2016.