Accueil > La mission > Les résultats ! > Accélération du Système Solaire

Accélération du Système Solaire

11/11/2021. La précision sans précédent des données astrométriques de Gaia EDR3 permet, pour la première fois à partir d’observations dans l’optique, d’observer le minuscule effet de l’accélération du Système Solaire par rapport à l’Univers lointain, matérialisé par les positions de plus d’1,2 quasars (ceux qui ont les meilleures mesures astrométriques parmi les 1,6 million observés par Gaia). Cette accélération est dominée par l’effet du mouvement de rotation du Système Solaire autour du centre de notre Galaxie mais contient aussi l’effet, encore beaucoup plus petit, des galaxies voisines.

Ce phénomène est le résultat d’un effet découvert par James Bradley en 1727 : l’aberration. La position apparente d’une étoile observée depuis la Terre dépend de la vitesse de la Terre. Plus généralement, la direction d’un objet céleste dépend de la vitesse de l’observateur, ici Gaia. Ceci est illustré par la Figure 1 : un personnage immobile reçoit (un jour sans vent !) la pluie tout droit du ciel. S’il se met à courir, il a l’impression que la pluie vient de devant lui. Par contre, quelqu’un qui le regarde voit bien la pluie tomber verticalement.

Figure 1 : illustration de l’aberration. © ESA/Gaia/DPAC – CC BY-SA 3.0 IGO

Si la vitesse change en fonction du temps, c’est à dire si l’observateur subit une accélération, les déplacements observés changent aussi, donnant l’impression d’un mouvement d’ensemble dans la direction de l’accélération. Dans le cas des observations de Gaia, cet effet produit un mouvement d’ensemble des quasars (situés à des milliards d’années-lumière de notre Galaxie), reflétant l’accélération du Système Solaire par rapport à l’Univers lointain. Il est dû à la combinaison de plusieurs mouvements : ceux de Gaia autour du Soleil, du Soleil autour du barycentre du Système Solaire, du barycentre du Système Solaire autour du centre de la Galaxie, et enfin de la Galaxie par rapport aux quasars. Les effets de ces différents mouvements ne sont évidemment pas du même ordre de grandeur.

Figure 2, à gauche : Illustration de la rotation du Soleil autour du centre de notre Galaxie. Image de fond : vue d’artiste de notre Galaxie © ESO1339e, NASA/JPL-Caltech/ESO/R. Hurt
Figure 3, à droite : Schéma des mouvements sur le ciel des quasars dus à l’accélération mesurée grâce aux données de Gaia EDR3. Le centre galactique est au milieu de la figure. Les flèches représentent la taille et la direction de l’accélération. L’ensemble de ces mouvements est légèrement décentré par rapport au centre de la Galaxie. © ESA/Gaia/DPAC - CC BY-SA 3.0 IGO

Ce minuscule effet avait été anticipé par John Pond en 1833, mais il aura fallu la précision de Gaia pour être capable de l’observer. Réciproquement, c’est un bon indicateur de la qualité astrométrique des données de Gaia. L’amplitude obtenue est de 5,05 ± 0,35 μas.yr-1, ce qui correspond à une accélération de 7,33 ± 0,51 km.s-1. Myr-1. En une seconde de temps, cette minuscule accélération entraîne une déviation de la trajectoire du système solaire d’environ 0,1 nanomètre vers le centre galactique, situé à quelque 26 000 années-lumières. Cette valeur est en accord avec les prédictions théoriques.

Ce résultat a été obtenu avec les données de Gaia EDR3, basé sur l’analyse de 24 mois de données. Il sera nettement amélioré grâce aux prochains catalogues : Gaia DR4 qui utilisera 66 mois de données et Gaia DR5 qui en utilisera jusqu’à 120. De plus, l’identification des quasars sera systématiquement obtenue en utilisant les données de Gaia et non les catalogues de quasars obtenus par d’autres instruments, ce qui devrait permettre d’en augmenter sensiblement le nombre. L’ensemble de ces aspets permet d’espérer atteindre une précision nettement meilleure que 0.1 μas.yr-1.

Références