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L’anticentre galactique

22/10/2021. Beaucoup d’études sont consacrées au centre galactique, région la plus dense de notre Galaxie qui abrite un trou noir supermassif en son cœur. La direction opposée, l’anticentre galactique, est aussi très intéressante car elle a de nombreuses particularités qui permettent d’étudier plus facilement les perturbations que notre Galaxie a subies au cours de son histoire. Dans cette direction, l’extinction interstellaire, due aux nuages de gaz et de poussière sur la ligne de visée, est beaucoup plus faible que vers le centre galactique. Cela permet d’observer des étoiles plus lointaines, appartenant non seulement au disque galactique mais aussi au halo et même à des populations stellaires extragalactiques accrétées par la Galaxie à différentes époques. De plus, à ces distances, plus de 8kpc du centre galactique, les effets de l’attraction gravitationnelle de la Galaxie elle-même sont plus faibles. En conséquence, toute perturbation ancienne de cette partie externe du disque venant de rencontres passées avec des systèmes stellaires extragalactiques aura entraîné des déformations plus importantes que dans le disque interne. En raison d’échelles de temps dynamiques plus longues, celles-ci devraient pouvoir être observées encore aujourd’hui.

Figure 1 : Vue d’ensemble de la Galaxie montrant la zone de l’anticentre, vue depuis le Système Solaire. © ESA/Hubble pour l’image d’une galaxie semblable à la nôtre ; ESA/Gaia/DPAC pour le dessin.

Les données astrométriques de Gaia EDR3, reposant sur 34 mois de données, sont nettement plus précises que celles de Gaia DR2 (reposant sur seulement 12 mois de données), et permettent d’explorer cette partie externe de notre Galaxie jusqu’à environ 17kpc du centre galactique. Dans la direction de l’anticentre, quasi exactement radiale, la combinaison de la parallaxe trigonométrique et des deux composantes du mouvement propre donne directement les vitesses perpendiculaires au plan galactique (vitesses verticales) et les vitesses de rotation autour du centre galactique (vitesses azimutales).

Cette étude permet de distinguer les étoiles du proto-disque galactique tel qu’il était il y a environ 10 milliards d’années. Il n’atteignait des distances que d’environ 14kpc du centre de la Galaxie et aurait grandi au fil du temps pour atteindre sa taille actuelle. Par ailleurs, les débris de la galaxie naine Gaia-Enceladus-Sausage qui serait entrée en collision avec la Voie Lactée à peu près à la même époque atteignent des distances plus grandes que cet ancien disque, au-delà de 17kpc. Ces deux populations se distinguent par des séquences différentes dans le diagramme HR : la Figure 2 montre les étoiles de Gaia EDR3 et de vitesse tangentielle plus élevée que 150 kms-1. Ces deux séquences étaient d’ailleurs déjà visibles dans les données de Gaia DR2 pour des vitesses supérieures à 200kms-1. L’analyse cinématique de ces deux ensembles, illustrée par la Figure 3, montre que les étoiles à faible rotation (y compris celles qui sont rétrogrades) sont beaucoup plus nombreuses dans la séquence bleue que dans la séquence rouge et atteignent de plus grands rayons galactocentriques. La séquence bleue est dominée par des étoiles provenant de l’accrétion de Gaia-Enceladus-Sausage alors que la séquence rouge est essentiellement composée d’étoiles du disque de notre Galaxie.
 

Figure 2 (à gauche) : Diagramme HR d’étoiles de l’anticentre galactique à grandes vitesses tangentielles (Vt > 150 kms-1). Les étoiles étudiées ici sont concentrées en deux séquences, à gauche séquence bleue (essentiellement des étoiles accrétées), à droite séquence rouge (essentiellement des étoiles du disque de notre Galaxie). Elles sont séparées par une isochrone, ligne d’âge égal, ici 11 milliards d’années, d’après un modèle d’évolution stellaire.
Figure 3 (à droite) : Distribution des vitesses des séquences bleue (à gauche) et rouge (à droite) en fonction de la distance au centre galactique. De haut en bas : étoiles plus proches que 11kpc, entre 11 et 14kpc, entre 14 et 17kpc. Vitesses verticales, Vb, en fonction des vitesses de rotation, VΦ, en kms-1.

Références :