La cinématique du disque galactique avec Gaia DR2
10/10/2019. Le deuxième catalogue Gaia, Gaia DR2, contient des données astrométriques (positions, mouvements propres et parallaxes trigonométriques) très précises pour plus de 1,3 milliard d’étoiles, mais aussi les premiers résultats du spectrographe de Gaia, le Radial Velocity Spectrometer (RVS) : des vitesses radiales (vitesses sur la ligne de visée, vers nous et au-delà de nous) pour plus de 7,2 millions d’étoiles. Ces vitesses radiales obtenues à partir de 280 millions de spectres observés pendant les 22 premiers mois de mission, sont les valeurs médianes des vitesses radiales individuelles observées à chaque transit (chaque observation pour les étoiles plus brillantes que la magnitude GRVS = 12, de vitesse radiale comprise entre -1000 et +1000 km/s et de température comprise entre 3550 et 6900 K (soit essentiellement les types spectraux F, G, K). Elles représentent 77,2% des étoiles de DR2 plus brillantes que G=12.5 (pour la majorité des étoiles, les magnitudes G sont plus faibles que les magnitudes GRVS).
La Figure 1 montre la première carte des vitesses radiales de notre Galaxie effectuée par un seul et même instrument, le spectromètre de Gaia (le RVS pour Radial Velocity Spectrometer) et rassemblant un nombre aussi important d’étoiles. Cette carte est l’illustration de la rotation galactique : l’ensemble des étoiles tournent, avec le Soleil, autour du centre galactique, mais avec une vitesse légèrement différente. La combinaison de ces mouvements se traduit par un ensemble d’étoiles qui s’éloignent de nous (en rouge) et un ensemble d’étoiles qui se rapprochent de nous (en bleu). On distingue aussi les vitesses différentes des deux satellites de la Voie lactée, les nuages de Magellan (LMC = Large Magellanic Cloud, SMC = Small Magellanic Cloud).
Figure 1 : Carte de la Voie lactée, vue depuis la position du Soleil, où sont portées l’ensemble de ces 7,2 millions de vitesses radiales (vitesses observées sur la ligne de visée) du deuxième catalogue Gaia (Gaia DR2). Le centre de notre Galaxie est au centre de la figure et le plan galactique est le segment de droite horizontal qui traverse la carte en son milieu. © Gaia/ESA/DPAC/D. Katz.
L’ensemble de ces données astrométriques et spectroscopiques pour des millions d’étoiles donne accès à une description en 6 dimensions d’une partie de notre Galaxie : pour chaque étoile, les coordonnées sur la sphère céleste (ascension droite et déclinaison), la distance au Soleil, les mouvements sur la sphère céleste (mouvements propres en ascension droite et en déclinaison), ainsi que la troisième composante du mouvement, la vitesse sur la ligne de visée, la vitesse radiale. Grâce à ces données, les vitesses spatiales (vitesses des étoiles dans la Galaxie) d’un échantillon de 6.4 millions d’étoiles de type spectraux F-G-K ont été calculées. Elles permettent de tracer une cartographie inédite des mouvements des étoiles dans un rayon d’environ 5000 pc (16 000 années-lumière) autour du Soleil.
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Figure 2 : Cartographie des mouvements radiaux dans le disque galactique (930 000 étoiles situées à moins de 200pc du plan galactique). A gauche, les mesures de Gaia sont superposées au tracé supposé des bras. A droite, un zoom montre le détail de ces mouvements radiaux : les flèches rouges indiquent des mouvements vers l’extérieur du disque galactique, les flèches bleues, des mouvements vers l’intérieur du disque. Le Soleil est au centre de la figure, représenté par un point noir de coordonnées X=-8.34 et Y=0. L’échelle des couleurs montre la valeur des vitesses radiales © Gaia/ESA/DPAC/Gaia Collaboration, D. Katz et al., A&A616, A11, 2018.
Ces mouvements non-axisymétriques dans le disque galactique sont, en particulier, dus à la présence des bras spiraux et de la barre. Ceci est illustré par des simulations du disque de notre Galaxie. La Figure 3 montre la simulation d’un disque de galaxie sans barre ni bras spiraux : à gauche, le disque vu du dessus, à droite, l’uniformité des vitesses radiales dans ce cas. La Figure 4 montre la simulation d’un disque de galaxie avec barre et bras spiraux : à gauche, une vue du dessus du disque, à droite, les perturbations produites par la barre et les bras spiraux sur les vitesses radiales. Sur ces deux Figures est aussi tracé du contour de la zone où sont situées les 930 000 étoiles de l’échantillon ci-dessus, avec vitesses radiales dans Gaia DR2. Sur la Figure 4, la Figure 2 est ajoutée en insert. La Figure 4 montre clairement les mouvements non axisymétriques provoqués par la présence de la barre et des bras spiraux, très semblables à ceux qui sont observés par Gaia.
Figure 3 : Simulation d’un disque de galaxie sans barre ni bras spiraux. A gauche : le disque vu du dessus. A droite : la carte des vitesses radiales avec le tracé du contour de la zone où sont les étoiles de l’échantillon avec vitesses radiales dans Gaia DR2. © Paola Di Matteo.
Figure 4 : Simulation d’un disque de galaxie avec barre et bras spiraux. A gauche : le disque vu du dessus. A droite : la carte des vitesses radiales avec le tracé du contour de la zone où sont les étoiles de l’échantillon avec vitesses radiales dans Gaia DR2 et, en insert, la Figure 2. © Paola Di Matteo.
Dans notre Galaxie, les étoiles sont aussi animées de mouvements perpendiculaires au plan galactique et de mouvements de rotation autour d’un axe perpendiculaire au plan galactique et passant par le centre de la Galaxie. La Figure 5 montre ces mouvements de rotation pour ce même échantillon de 930 000 étoiles F-G-K, situées à moins de 200pc de part et d’autre du plan galactique. Elle illustre les variations de ce mouvement de rotation en fonction des coordonnées X et Y dans le plan galactique : plus lent en bleu, plus rapide en rouge.
Figure 5 : Cartographie des mouvements de rotation autour du centre de la Galaxie pour 930 000 étoiles situées à moins de 200pc de part et d’autre du plan galactique. Le Soleil est au centre de la figure, représenté par un point noir de coordonnées X=-8.34 et Y=0. L’échelle des couleurs montre les vitesses de rotation en km.s-1 © Gaia/ESA/DPAC/Gaia Collaboration, D. Katz et al., A&A616, A11, 2018.
Références :
- Gaia collaboration, D. Katz et al., A&A 616, A11, 2018
- D. Katz et al., A&A 622, A205, 2019
- P. Sartoretti et al., A&A 616, A6, 2018