Le diagramme HR avec Gaia DR2
Le diagramme de Hertzsprung-Russell (diagramme HR), qui montre la relation entre la luminosité propre des étoiles (leur éclat intrinsèque ou magnitude absolue) et leur couleur ou leur température (la couleur permet d’estimer la température) est très utilisé en astronomie car il reflète de nombreux paramètres décrivant les étoiles. En effet, chaque étoile va se déplacer dans le diagramme au cours de sa vie, arrivant très vite sur la séquence principale où elle va passer toute la période pendant laquelle elle brûle son hydrogène, le transformant en hélium. Cet intervalle de temps est d’autant plus long que la masse de l’étoile est petite. La position des étoiles dans le diagramme HR dépend ainsi essentiellement de leur masse et de leur âge, mais elle varie aussi avec la population à laquelle elles appartiennent, le contenu en éléments lourds (souvent appelés métaux) de leur atmosphère, leur appartenance à un système binaire, etc.
La quantité, la très haute précision et l’homogénéité des données du deuxième catalogue Gaia permettent de distinguer un luxe de détails jamais vus auparavant : dans Gaia DR2, sur les plus de 72 millions d’étoiles avec des erreurs sur la parallaxe plus faibles que 10%, il y en a près de 4,3 millions avec, de plus, une photométrie précise et une faible extinction sur leur ligne de visée. Ces nombres sont à comparer à un peu plus de 30 000 étoiles avec une précision relative sur la parallaxe meilleure que 10% dans Hipparcos et moins de 1000 avant l’ère de l’astrométrie spatiale. L’abondance et la qualité des données de Gaia DR2 permettent de faire de fins découpages, par population d’étoiles, par amas ouvert ou globulaire, par intervalle de vitesse, etc.
Diagrammes HR des étoiles proches
Figures 1a, 1b et 1c : Diagrammes HR construits avec les données astrométriques et photométriques les plus précises de Gaia DR2 pour les étoiles plus proches que 25pc (3724 étoiles), 50pc (26 683 étoiles) et 100pc (212 728 étoiles). © Gaia/ESA/DPAC/Gaia Collaboration, C. Babusiaux et al., A&A 616 A10, 2018, Fig. 6.
Les Figures 1a, 1b, et 1c montrent les diagrammes obtenus pour les étoiles ayant une très bonne précision sur les mesures de distances (incertitude relative sur les parallaxes trigonométriques inférieure à 10%) et de magnitudes (étoiles situées dans des zones à faible extinction interstellaire) situées à moins de 25, 50 et 100 pc. Sur les Figures 1a et 1b on remarquera la finesse de la séquence principale pour les étoiles de type spectral F, G et K (GBP - GRP entre 1 et 2), s’élargissant ensuite vers les étoiles de type M (GBP - GRP entre 2 et 3) pour redevenir plus fine ensuite vers les naines brunes. Plus on va loin en distance et plus on couvre des types d’étoiles un peu moins fréquents :
- de plus en plus d’étoiles géantes, jusqu’à mettre clairement en évidence les grumeaux des géantes rouges en haut à droite du diagramme de la Figure 1c ;
- de plus en plus de naines blanches, avec la séparation entre naines blanches à hydrogène et naines blanches à hélium visible pour la première fois sur un diagramme HR ;
- la séquence des étoiles binaires non résolues qui se peuple de plus en plus (soulignée par la ligne verte sur la Figure 1c).
Diagrammes HR des amas
Les amas d’étoiles, que ce soient des amas ouverts ou des amas globulaires, sont des ensembles plus ou moins denses regroupant des étoiles de même âge et de même composition chimique. Sur un diagramme HR, la précision et l’homogénéité des données de Gaia permettent ainsi de tracer de magnifiques isochrones (lignes d’âge égal) pour un éventail d’âges et de compositions chimiques.
Figure 2 (à gauche) : Diagramme HR composite de 32 amas ouverts. Utilise les extinctions et modules de distance obtenus à partir de données de Gaia DR2. Échelle de couleur = âge. © Gaia/ESA/DPAC/Gaia Collaboration, C. Babusiaux et al., A&A 2018, Fig. 2.
Figure 3 (à droite) : Diagramme HR composite de 14 amas globulaires. Échelle de couleur = métallicité. © Gaia/ESA/DPAC/Gaia Collaboration, C. Babusiaux et al., A&A 616 A10, 2018, Fig. 3.
La Figure 2 montre un diagramme HR composite de 32 amas ouverts : elle est une illustration remarquable de l’évolution de la position du turn-off (endroit du diagramme HR où les étoiles quittent la séquence principale) et de la densité du grumeau des géantes rouges en fonction de l’âge des amas. Par ailleurs, les étoiles de faible masse les plus jeunes (en bleu) sont clairement au-dessus de la séquence principale (en bas à droite de la figure) alors que les plus jeunes des étoiles les plus massives (en haut à gauche de la figure) sont au-dessous.
La Figure 3 montre la combinaison des diagrammes HR de 14 amas globulaires et leur évolution en fonction de leur contenu en métaux : les amas les pauvres en métaux sont les plus bleus, les plus rouges étant les plus riches, et ce sont les étoiles les plus pauvres en métaux qui peuplent les branches horizontales.
Diagrammes HR de différentes sélections en fonction de la cinématique
Ce dernier exemple montre les différents diagrammes HR toujours obtenus à partir des étoiles ayant une précision sur la parallaxe meilleure que 10% et une faible extinction (E(B-V)<0.015), mais aussi avec trois sélections différentes sur la vitesse tangentielle (vitesse des étoiles dans le plan tangentiel à la sphère céleste). Ces sélections mettent en évidence des populations d’étoiles d’âge et de contenu en métaux différents.
Figures 4a, 4b et 4c : Diagrammes HR (magnitude absolue Gaia en fonction de la couleur GBP - GRP) d’échantillons d’étoiles sélectionnés d’après leur vitesse tangentielle, VT. De gauche à droite : VT < 40 km/s, regroupant essentiellement des étoiles du disque mince de notre Galaxie ; 60 km/s < VT < 150 km/s, regroupant essentiellement des étoiles du disque épais ; et VT > 200 km/s, regroupant essentiellement des étoiles du halo. © Gaia/ESA/DPAC/Gaia Collaboration, C. Babusiaux et al., A&A 616 A10, 2018, Fig. 21.
La Figure 4c, à droite, montre, pour la première fois deux séquences distinctes dans les étoiles du halo, dont les contenus en métaux sont légèrement différents. Ces deux sous-populations, de cinématique et d’âge différents, semblent provenir de scenarios de formation très différents.