Un transit de la Lune
13/11/2015. Gaia est en orbite autour du point de Lagrange L2 - et autour du Soleil - à 1.5 million de km de la Terre. Bien que destiné à effectuer un relevé détaillé des étoiles de notre Galaxie, Gaia a été le témoin privilégié, et unique, d’un évènement rare : un transit de la Lune devant le Soleil. Un transit se produit lorsqu’une planète passe devant une étoile. Depuis la Terre, on peut observer des transits de Vénus ou de Mercure devant le Soleil. Les planètes apparaissent alors comme des taches noires sur le disque solaire, bloquant une partie de la lumière et de la chaleur émises par le Soleil.
Depuis la Terre, nous pouvons voir la Lune passer devant le Soleil, produisant des éclipses partielles ou totales, car les diamètres apparents de la Terre et du Soleil vus depuis la Terre sont semblables. Par contre, il nous est impossible de voir la Lune comme une petite tache noire traversant le Soleil. C’est ce qui est arrivé à Gaia, grâce à sa très grande distance du système Terre-Lune. Le 6 novembre 2015, pour plus de 10 heures, Gaia, la Lune et le Soleil étaient parfaitement alignés. Bien sûr, Gaia n’a pas regardé pas en direction du Soleil, mais ses capteurs de température (thermistances) on mesuré les changements de température tout au long du transit.
Afin de surveiller la santé et les conditions physiques du satellite, ces thermistances mesurent la température toutes les minutes en de nombreux endroits du télescope et de son module de service, et renvoient ces mesures régulièrement au sol. Pendant la première année de mission, des petites variations de température ont déjà été observées : des variations annuelles dues aux variations de la distance au Soleil, produisant des variations du flux solaire de plus ou moins 3.4% et des changements de température de plus ou moins 1.2°, et des variations de période 6h liées à la rotation de Gaia sur lui-même. Dans ce dernier cas, les variations de température atteignent 2° à chaque rotation.
Le transit du 6 novembre 2015 a démarré à 8:18 UTC (GMT) par le premier contact (contact extérieur) entre le disque de la Lune et celui du Soleil. Le flux solaire a ensuite diminué progressivement pendant environ deux heures jusqu’à ce que le disque de la Lune soit entièrement visible devant le Soleil. Pendant les 6 heures suivantes, le flux solaire est resté constant jusqu’au troisième contact, puis a ré-augmenté pendant les deux heures suivantes alors que la Lune sortait du disque solaire. Le transit a pris pris fin à 18:35 UTC. Les figures ci-dessous montrent la chute de flux prévue pendant le transit (à gauche) et les variations de température réellement mesurées une fois éliminées les oscillations dues à la rotation de Gaia sur lui-même toutes les 6 heures (à droite).
D’une durée totale de 10h, soit 1.7 rotation de Gaia sur lui-même, le transit a provoqué, comme prévu, une chute de température d’environ 1.5 °C. Cela devrait permettre d’estimer l’inertie thermique des différents composants du satellite. Dans les parties les mieux isolées du satellite, on n’a détecté que de très faibles changements de température. Toutes ces mesures vont être examinées en détail.
L’orbite de Gaia autour de L2, à 1.5 million de km de la Terre dans la direction opposée au Soleil, a été choisie pour minimiser de tels évènements afin que l’environnement thermique soit aussi stable que possible. Cependant, un autre transit est prévu pour mai 2016, et deux transits rasants, pendant lesquels une fraction seulement du disque de la Lune couvrira celui du Soleil, sont prévus pour avril 2016 et février 2019.
© François Mignard, OCA, France, et José Hernández, Gaia Operational Data & Calibration Engineer at ESAC, Espagne.
Voir Gaia image of the Week du 6 novembre 2015, et Gaia image of the Week du 11 novembre 2015.