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Gaia nous parle !

19/12/2014. Il y a exactement un an, le 19 décembre 2013 à 10:12 heure de Paris, une fusée Soyouz VS06 avec Gaia à bord a décollé du port spatial de l’Europe en Guyane française. Une année passionnante et bien remplie : une insertion en orbite autour de L2 parfaitement réussie, une période de mise en service un peu compliquée avec six mois de test intensifs avant le démarrage des opérations de routine. Cette phase de routine a commencé le 25 Juillet 2014 et Gaia cartographie en moyenne 40 millions d’étoiles d’un jour. L’état du satellite et le niveau d’utilisation de consommables actuel montre que la mission peut être prolongée au-delà de sa durée de vie nominale de 5 ans.

En un an, Gaia a enregistré 11,1 milliards de transits sur ses 106 CCDs, 120,5 milliards de mesures astrométriques, 22,2 milliards de mesures photométriques et 3,3 milliards de mesures spectroscopiques. Le volume total de données obtenues jusqu’à maintenant par Gaia est de 9.2 TB. Le ciel tout entier a été observé au moins une fois dans la phase de routine. La magnitude limite des observations astrométriques et photométriques est de G = 20,7 mag, celle des observations spectroscopiques est de GRVS = 16.2.

Des centaines de personnes ont participé à ce démarrage fructueux !

Voir ci-dessous le témoignage de l’équipe de l’Observatoire de Paris chargée de l’analyse des données spectroscopiques de Gaia et ceux d’autres équipes sur le site Gaia de l’ESA.

Un an plus tard : souvenirs et émotions …
par l’équipe Gaia de l’Observatoire de Paris

Le jour du lancement : 19 décembre 2013
Observatoire de Paris, Nicolas Leclerc, Jila Varoquier.

© Observatoire de Paris, Nicolas Leclerc, Jila Varoquier.

Sur la photo (de gauche à droite) : Carine Babusiaux, Brigitte Rocca (IAP), William Thuillot, Christophe Le Poncin-Lafitte, Yves Viala, Paola Sartoretti, Alain Gueguen, Catherine Turon, Françoise Crifo, Nicolas Leclerc, Ana Gómez, David Katz , Olivier Marchal, Annie Robin (Besançon), Laura Ruiz-Dern, Shan Mignot, Yveline Lebreton et Frédéric Arenou.

 

Nous espérions tous assister au lancement de Gaia en étant au cœur de l’événement et nous avions réussi à nous organiser pour que tous les membres de l’équipe qui le souhaitaient puissent aller soit à l’ESOC (le Centre d’Opérations de l’ESA) à Darmstadt, soit au CNES à Toulouse, soit même à Kourou. Certains d’entre nous ont commencé à participer aux travaux sur Gaia il y a plus de 15 ans, dès sa conception et l’étude de ses applications scientifiques et nous étions tous très impatients de célébrer le lancement là où l’action se déroulerait.

Rétrospectivement, acheter des billets d’avion non remboursables pour Kourou était peut-être passablement optimiste : que le lancement ait été retardé d’un mois n’était pas inattendu, mais comment aurions-nous pu imaginer qu’il serait avancé d’un jour au dernier moment ? Face à cette nouvelle situation, nous avons jugé préférable d’oublier Kourou (nous avons obtenu un remboursement plus tard) et de nous concentrer sur l’organisation de l’exposition Gaia, le ciel en profondeur et de la retransmission du lancement dans la superbe salle Cassini de l’Observatoire de Paris.

Un lancement parfait, quelques jours avant Noël : quel cadeau aurait pu être plus beau ? Ce sentiment était partagé par tous les collègues invités à la cérémonie, qu’ils ou elles aient eu un rôle dans la mission, qu’ils ou elles aient ou aient eu des responsabilités à l’Observatoire de Paris ou dans l’une de nos tutelles, le CNES bien sûr, mais aussi le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche ou le CNRS. Celles et ceux d’entre nous qui avaient participé à l’aventure Hipparcos, le précurseur de Gaia, savaient que le succès d’un lancement n’est jamais garanti. Après le décollage, le sentiment de joie et de soulagement n’a vraiment été palpable qu’après le déploiement du bouclier thermique et de ses panneaux solaires. Ce que nous n’avions pas prévu, c’étaient les nombreuses interviews à la presse, le fameux « quart d’heure de célébrité » ! Ces entrevues ne durant que rarement plus de quelques minutes, devenir vraiment célèbre devra sans doute encore attendre le prochain lancement d’un satellite d’astrométrie (dans deux décennies… au moins !).

Nous avons reçu nos premières données Gaia début Janvier 2014, environ trois semaines après le lancement. Ce n’était pas encore de l’information scientifique (qui est arrivée quelques jours plus tard), mais des informations sur les détecteurs eux-mêmes. Information très basique, mais après 15 ans de préparation de la mission, elle était pour nous une immense source de joie et d’excitation : Gaia nous parlait !

Les premiers spectres stellaires sont arrivés peu après. À la mi-Janvier, une opération d’étalonnage, nommée poétiquement (!) PLM_COM_010, a été menée. Son objectif était de mesurer et d’étalonner la très faible illumination produite par les lasers à bord de Gaia. Pour ce faire, des bandes de pixels étaient lues continument et transmises au sol. Sous-produits de ces travaux d’étalonnage, les spectres des étoiles qui, par hasard, tombaient sur ces bandes de pixels furent également enregistrés. C’est ainsi que nous avons reçu nos premiers spectres Gaia : voir Figure 1 (à gauche).

Dans les semaines qui ont suivi l’acquisition de ces tout premiers spectres, de nombreux paramètres ont été affinés et optimisés. Pour en citer quelques-uns : l’attitude du satellite, les paramètres du logiciel embarqué, la mise au point des télescopes et bien d’autres. Tous ces réglages ont amené le spectrographe à ses performances nominales, comme illustré sur la Figure 2 (à droite).

Spectre brut
ESA / Gaia / DPAC / Airbus DS, David Katz, Olivier Marchal
Spectre après mise en route
ESA / Gaia / DPAC / Airbus DS, David Katz, Olivier Marchal, Caroline Soubiran

Figure 1 (à gauche) : L’un des premiers spectres bruts de Gaia (17 janvier 2014).
© ESA / Gaia / DPAC / Airbus DS, David Katz, Olivier Marchal.

Figure 2 (à droite) : Spectre de Gaia (en haut), après les principales étapes de la mise en service (12 avril 2014), comparé à un spectre pris au sol avec Narval au Pic du Midi de Bigorre(en bas). Spectre de HIP 86564, étoile rouge froide de type spectral K5 et de magnitude 6.64.
© ESA / Gaia / DPAC / Airbus DS, David Katz, Olivier Marchal, Caroline Soubiran.